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La pratique de gestion : « À grands pouvoirs, grandes responsabilités ! »

Par Olivier Guérin

Dans les 15 dernières années, la pratique de gestion a bien évolué avec un focus sur la dimension humaine, tel le leadership conscient ou encore le leadership humaniste: des aspects de leadership qui couvrent un aspect fondamental pour l’évolution saine et pérenne des organisations.  

Cependant, fort est de constater qu’encore à ce jour, l’une des causes principales de départ des employés concerne la relation ou une forme d’incompatibilité avec leur gestionnaire direct. 

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Pourtant, bon nombre de cours et de programmes de leadership ont vu le jour, avec des modèles d’accompagnement de type coaching qui se sont démocratisés avec une facilité d’accès. En toute logique, il serait évident de constater une nette amélioration, avec une baisse significative du taux de départ des employés liés à cet aspect.  

Mais que se passe-t-il donc? Où se situe l’enjeu principal concernant ce constat, qui, avec le recul, reste une constante à fort impact. Et ce, autant pour les employés concernés, que pour les gestionnaires et les organisations qui en subissent les impacts humains, opérationnels et financiers. 

Départ des employés : un enjeu de fond 

À qui la faute ? 

En premier lieu, cet état de fait relève surtout d’une complexité systémique et non d’un élément unique sur lequel nos biais de perceptions ont tendance à se focaliser.     Au lieu de faute, il semble plus juste de mettre en avant la notion de responsabilité, car il y a, et heureusement, assez peu de fautes comportementales de la part des gestionnaires en vertu des codes éthiques de travail de chaque organisation... Même si cela peut se produire de manière regrettable comme le harcèlement moral ou physique. 

Au niveau systémique, qui inclut la dimension éducationnelle, sociale et culturelle, il y a ces notions d’ambition et d’élévation sociale tant promulguées et mises en avant à répétition à travers les différents médiums d’informations et de réseaux sociaux. 

L’ambition - aspirer à évoluer, grandir professionnellement tout en récoltant les fruits de son travail et de ses responsabilités - est une notion tout à fait honorable. Maintenant, la manière dont cette ambition est vécue et appliquée par chaque personne, surtout dans des postes de gestion, fait toute une différence. 

Bien souvent, plusieurs archétypes ou stéréotypes sont encore bien actifs et ancrés dans l’inconscient collectif. Pour exemples :

  • « Mon statut social détermine mon niveau de réussite. »
  • « Je dois absolument montrer ma valeur » (au détriment des autres).

Ce phénomène est particulièrement présent dans des organisations qui priment la reconnaissance basée sur les apparences et le visuel de livrables, et moins sur toute la dynamique et le travail collaboratif qui ont permis ces mêmes réalisations.  

Ces tendances plus ou moins conscientes se traduisent en comportements de la part des gestionnaires qui, fondamentalement, ont des bonnes intentions pour eux-mêmes et leur famille. Mais en contexte d’entreprise, cette bonne intention est recouverte par un ensemble de facteurs, de biais et de paradoxes humains qui génèrent des impacts insoupçonnés et oh combien dommageables pour les membres d’équipe, les collègues et l’organisation dans son ensemble. 

Est-ce que les gestionnaires sont seuls responsables de cette situation ? 

Bien sûr que non, car un système aussi complexe qu’une personne en interrelation avec d’autres dans une organisation ou une entreprise qui a ses propres codes, valeurs et culture, inclut une vastitude de paramètres à considérer. 

La pratique de gestion : une responsabilité sous-estimée 

Puisque le gestionnaire est en position d’autorité avec un rôle et des responsabilités vis-à-vis d’une équipe composée de personnes, il a une part de responsabilité importante. 

« À grands pouvoirs, grandes responsabilités » 

En pratique de coaching, qui s’intègre de plus en plus dans les pratiques de gestion et de consultation via des programmes spécifiques, le savoir-être d’un coach professionnel ou d’un consultant inclut d’intégrer et de refléter une posture éthique de bienveillance, de considération et d’ouverture, avec un savoir-faire flexible pour faciliter le développement engagé et la réalisation d’objectifs d’une personne dans un contexte donné.  

De même, pour un gestionnaire (qui n’a certes aucune obligation d’être formé et d’appliquer une méthodologie de coaching pour gérer et accompagner les membres de son équipe), il est fondamental que cette dimension du savoir-être soit tout autant bien identifiée et intégrée, et pas seulement comprise ou acquiescée sur le papier. 

Évidemment le savoir-faire inclus dans les programmes de coaching, de leader-coach ou de posture coach, avec ses multiples méthodologies et outils à disposition, reste tout aussi important.  

De par sa position d'autorité, associée à de grandes responsabilités, le gestionnaire se retrouve de fait avec un grand pouvoir (trop souvent sous-estimé). Cette position, connue de tous les membres d’équipes et collaborateurs, a pour effet de créer une dynamique relationnelle particulière entre le gestionnaire et les autres parties. En effet, un gestionnaire a non seulement le pouvoir de recruter et de congédier, mais jouit également d'un accès privilégié à certaines informations sensibles fournies par la direction.   

Ces aspects lui procurent une certaine importance et considération. Il se doit donc d’être au plus clair à travers ses comportements et attitudes avec ses collaborateurs.  

En conséquence, sa manière d’interagir avec les membres de son équipe par des messages explicites et attitudes implicites, représente un aspect capital pour développer un esprit d’équipe. 

Ambition et valeurs humaines 

Pour complexifier le tout, viennent s’ajouter les attitudes et comportements liés à l’ambition et articulés par des valeurs profondes, alignées plus ou moins avec celles de l’organisation.  

À noter qu’être ambitieux peut tout à fait se conjuguer avec bienveillance, reconnaissance et contribution au développement des membres d’équipes.  Pour exemple, certains gestionnaires ont instauré des rituels de rencontres quotidiennes de libre-échanges en début de matinée avec leurs équipes.  

Évidemment, il y a un cadre éthique mis en place pour développer cet espace de partages professionnels et relationnels ouverts, avec une vigilance de respect du cadre, car l’affectif est présent et se développe au fil des rencontres.  

Lors de moments ou phases d’enjeux difficiles, l’esprit d’équipe s’active alors et chacun fournit les efforts nécessaires et prend soin de ceux ou celles qui en ont besoin. Toute l’équipe se tient les coudes pour passer à travers les remous ou la tempête ponctuelle. 

Cela fait chaud au cœur d’être témoin de ce type de cohésion. Une bonne part du mérite revient au gestionnaire qui a insufflé une dynamique d’équipe avec respect, bienveillance et intégrité. Et bien sûr, chaque membre d’équipe mérite tout autant d’avoir contribué et joué un rôle important dans l’émergence et l’activation de cet esprit d’équipe. 

En lien avec ces types de pratiques, lesquelles visent à vraiment considérer la personne avant l’employé, un numéro de badge ou une fonction, et au vu des besoins et demandes des employés, gestionnaires et exécutifs, de nombreux programmes de leader-coach ont fait leur apparition dans les dernières années.

Il y a donc bien des possibilités et des solutions concrètes pour conjuguer ambition, leadership et performance. 

C’est juste dommage et nuisible que certains gestionnaires, heureusement très minoritaires, mais oh combien néfastes aux personnes, s’inscrivent à ces types de programmes d’accompagnement pour en tirer des éléments clés de manipulation et non d’influence avec intégrité. 

Distinguer influence et manipulation 

L’influence avec intégrité, c’est exprimer clairement une intention et les moyens mis en œuvre pour la réaliser dans le respect de tous. La manipulation, c’est agir avec un agenda caché au détriment des autres et de l’organisation. 

Ce type de comportement, incarné par un gestionnaire ambitieux mais aux valeurs et comportements égocentriques, dessert fortement une équipe et l’organisation. C’est aussi dans ce sens que cet article souhaite sensibiliser autant que possible l’impact, plus ou moins conscient, qu’a un gestionnaire auprès des personnes et collaborateurs qui vont l’écouter, agir et le côtoyer régulièrement.  

Personne n’est parfait et chacun fait du mieux qu’il peut à chaque jour. Pour un gestionnaire, c’est d’autant plus important de prendre du recul sur sa propre pratique de gestion, de partager avec des pairs, de demander et écouter le feedback donné pour se remettre en question. Car son travail va bien plus loin que le rôle et les responsabilités qui lui sont demandés d’endosser.  

La pratique de gestion : chaque geste compte 

En effet, un gestionnaire intervient directement et régulièrement avec des personnes, plus ou moins jeunes et en devenir, qui, fondamentalement, aspirent, pendant leur parcours professionnel, à une relation convenable, voire porteuse de belles réalisations. En effet, la carrière joue souvent un rôle central dans la vie d'un collaborateur et a un impact certain sur les dimensions personnelles, sociales et familiales. 

De ce fait, l’attitude, les gestes, les mots, les silences, les actions d’un gestionnaire ont un effet (direct et indirect) vers les membres de son équipe et les personnes avec qui il échange et collabore. 

Toutes ses interactions répétées sont comme des semences dans des jardins au terreau fertile. Pour chaque action, geste, parole et attitude, il y a un effet à court, moyen et long terme. Et cet effet, répété sur plusieurs jours, semaines, mois et années cristallise des comportements et une certaine dynamique de travail. Les graines poussent et se déploient dans la systémie complexe des personnes et des équipes, avec l’émergence de comportements et attitudes résultant des actions du gestionnaire. 

Évidemment, tout ne dépend pas du gestionnaire. Chaque employé a sa propre existence, desseins et responsabilité. Mais par l’autorité et le pouvoir de sa position, ainsi que par ces actions renouvelées, le gestionnaire va influer bien plus qu’il ne pense ou le croit sur chaque personne de son équipe, le climat qui en émerge, sa mobilisation et son engagement.  

Heureusement, tant qu’un gestionnaire est animé de réelles valeurs orientées esprit d’équipe et valorise le collectif avec une reconnaissance individuelle, quelle que soit la manière dont il s’y prend, son leadership va évoluer de manière positive, avec des impacts favorables au niveau des membres de son équipe, des collaborateurs, pour lui-même et l’organisation. 

Maintenant, au gestionnaire de décider de ses propres moyens d’action, avec l’aide éventuelle de mentors ou de consultants, pour exceller dans son métier ; ce qui requiert savoir-être et savoir-faire. Il existe bon nombre d’options à sa disposition, en interne ou auprès d’organismes de formations.  

Dans tous les cas, avec respect et gratitude, ces gestionnaires qui s’inscrivent dans cette voie font une réelle différence auprès des personnes avec qui ils interagissent et pour les organisations qui les intègrent, et cela mérite d’être souligné. 

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