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L’orientation employé·e comme philosophie de développement durable en entreprise

Par Marie-Elaine Duguay et Luc Lachapelle

À l'heure où le désengagement des employés est un enjeu central pour beaucoup d'organisations, les modèles et pratiques de gestion doivent être repensés afin qu'expérience employée (EX) et croissance organisationnelle soient complémentaires. Or, dans le contexte socio-économique actuel, sujet à des tensions de nature économiques, sociétales et, surtout, environnementales, il n'est pas toujours facile pour les décideurs de savoir par où commencer.

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Et si…

Et si nos organisations étaient enfin en phase avec qui nous sommes, ce dont nous avons vraiment besoin et ce à quoi nous aspirons ?

Et si nous nous permettions de prendre conscience de l’environnement global dans lequel nous évoluons ?

Et si nous développions une meilleure conscience de soi et de l’autre afin de mieux nous positionner et faire des choix éclairés, responsables et durables ?

Et si les silos organisationnels et sectoriels dans lesquels nous évoluons ne nous permettaient plus d’attirer les talents nécessaires à la pérennité et à la croissance de nos organisations ?

Et si le contexte socio-économique actuel représentait une véritable occasion de transformation de notre cadre de gestion du capital humain ?

Les gens font les organisations

Nous déposons ici ces mots alors que simultanément est diffusée sur les ondes d’ICI Radio-Canada l’émission Les années lumières, enregistrée lors du 90e Congrès de l’Acfas tenu en mai 2023 à l’Université de Montréal. Les réflexions sur le contexte socio-économique actuel abondent, tant dans la littérature scientifique que dans les médias spécialisés ou traditionnels. Les préoccupations planétaires et scientifiques dominent l’actualité plus que jamais. D’ailleurs, Le Devoir a publié un cahier spécial fort intéressant sur le Congrès intitulé 100 ans de savoir pour un monde durable.

Dans cet article, Adèle Surprenant aborde le développement et la mise en place de nouvelles pratiques de gestion dans un contexte de tensions économiques, environnementales et sociales. Les préoccupations quant aux changements climatiques qu’entretiennent les gestionnaires de PME ou de grandes entreprises comptent parmi les conciliations qui doivent être incluses dans la gestion de leurs priorités et de leur capital humain, l’actif organisationnel le plus important.

Dorénavant, être en phase avec soi dépasse la simple cohérence.

Étonnamment, entre pénurie de main-d’œuvre, pandémie et changements climatiques, cette révision des pratiques de gestion peine encore à faire consensus quant aux moyens à déployer.

Ce climat complexe de gestion exige une bonne dose de résilience et de courage managérial pour prendre les décisions nécessaires. Les transformations redéfinissent nos entreprises et exigent la mise à jour de notre cadre de gestion des compétences et du capital humain pour guider nos décisions face aux changements.

PwC présente tout un dossier sur Les effectifs de l’avenir dans lequel on cite 4 facteurs qui contribuent au nouveau monde du travail :

  1. La progression de la technologie
  2. L’essor du travail hybride
  3. Le décalage des compétences
  4. Un marché incertain

L’écosystème corporatif est à l’évidence intégré à la société globale et non pas en marge de celle-ci ; il en sent et ressent les moindres soubresauts… Le facteur humain en est le liant sociétal et organisationnel.

En réponse à ces constats, nous avons récemment vu apparaître dans le marché de l’emploi une croissance des postes et des compétences liées à la gestion de la diversité et de la responsabilité sociale des organisations. La taxonomie « verte » des postes en marketing, en RH ou en finance est de plus en plus en vogue. Or, ces nouvelles préoccupations organisationnelles requièrent le développement de nouvelles compétences et d’habiletés, comme la littératie des données, la transparence, l’agilité, un leadership plus conscient et une capacité à gérer ses équipes malgré l’incertitude et la distance.

Les spécialistes du MIT ont publié un article présentant les 5 compétences clefs que doivent maîtriser les gestionnaires pour développer une main-d’œuvre prête pour l’avenir — 5 traits of the workforce of the future | MIT Sloan. Parmi ces compétences, les notions de digitalisation, d’automatisation et d’intelligence artificielle sont au cœur des transformations et des préoccupations de nos organisations et viennent notamment chambouler les pouvoirs et la communication entre les différentes générations.

De plus, l’un des traits propres aux gestionnaires de l’avenir qu’il convient de mettre en lumière est celui de l’engagement envers l’équité et l’environnement.

Les gestionnaires de demain deviendront des agents de changement et transformeront profondément la culture et la façon dont les organisations fonctionnent, forment et valorisent leurs équipes.

Pour pallier le désinvestissement et le désengagement du personnel, les habiletés en communication deviennent condition sine qua non à la pérennité. Notons au passage que pour les personnes nouvellement arrivées sur le marché du travail, le concept d’équité s’étend également à la gouvernance et la responsabilité sociale des organisations.

Les critères ESG nous amènent aussi à penser nos organisations autrement. Le succès n’est donc plus seulement lié aux résultats financiers, à la divulgation d’information ou à la gestion de la diversité, mais aussi à l’intégration de tous ces principes, et plus encore, dans notre stratégie et nos investissements. Les pratiques et les initiatives en RSE deviennent des critères de sélection importants aux yeux des candidates et des candidats.

À ce propos, une étude de 2016 de Cone Communication révèle que 64 % des enfants du millénaire considèrent les engagements sociaux et environnementaux d’une entreprise pour choisir leur lieu de travail.

Ce sont les gens qui font les organisations et non pas l’inverse. D’ailleurs, les tendances ont changé en ce qui concerne la perception des organisations.

Et si nos organisations étaient enfin en phase avec qui nous sommes, ce dont nous avons vraiment besoin et ce à quoi nous aspirons ? L’être humain est fondamentalement un être de relations. Et si cet être humain trouve satisfaction dans sa relation d’emploi, la tendance sera d’y demeurer, car son expérience est positive.

Objectif EX-MAX

Une expérience-employé (EX) optimisée devra nécessairement afficher un score élevé notamment sur :

  • L’adéquation des valeurs individuelles et organisationnelles
  • Le sentiment de sécurité et de confiance
  • Le bien-être et l’engagement
  • La satisfaction au travail
  • L’autonomisation et la flexibilité
  • L’appartenance et la reconnaissance
  • Le soutien et l’accompagnement
  • Le développement des compétences

Viser un tel objectif n’est pas chose simple. La cible impose d’emprunter un itinéraire transdisciplinaire, multifactoriel et qui dépasse l’unique responsabilité des RH.

Comment les cadres et les organisations peuvent-elles réorienter leurs équipes ? Comment les organisations peuvent-elles affronter les besoins et les préoccupations de l’avenir ?

Les gestionnaires doivent être stratégiques, agiles et adopter des pratiques durables pour faire face au contexte actuel et répondre aux attentes. Pour la majorité des organisations qui empruntent cette voie en transcendant l’unique esthétique du discours, il s’agit d’un bouleversement qui empruntera le chemin d’une transformation holistique — une démarche fondamentalement intégrée pour métamorphoser l’ADN organisationnel, au niveau stratégique, tactique, opérationnel.

L’orientation-employé·e comme philosophie de gestion : perspective durable

Une expérience-employé (EX) optimisée résulte d’une philosophie de gestion orientée-employé·e (EC) appliquée. Cette réflexion soutenant l’orientation-employé·e (EC — Employee Centric) s’inscrit notamment dans le cadre de la durabilité en gestion des ressources humaines (Sustainable Human Resource Management - SHRM), laquelle remplit deux missions :

  • Assurer la durabilité de l’employé·e et développer des politiques de gestion des ressources humaines pour attirer en permanence, retenir et développer une main-d’œuvre motivée.
  • Assurer la durabilité de l’entreprise en se concentrant sur les 3 piliers de la durabilité, à savoir le social, l’écologique et l’économique.

L’orientation-employé·e requiert de se donner de la perspective, de prendre de la hauteur, sur l’expérience-employé dans son ensemble. Proposons ceci comme positionnement stratégique qui permet de reconnaître la valeur, la contribution et surtout, pour créer du sens.

Au cœur du paradigme du développement durable s’inscrit la notion de passer du développement purement économique vers un développement plus conscient, plus humain. Va pour le niveau stratégique.

Quant au niveau tactique, posons un instant notre regard sur le rôle et le développement des gestionnaires intermédiaires. Ce groupe est au cœur des défis organisationnels liés à la gestion des employé·es (individus) et des équipes (groupes), en plus d’être appelé à contribuer individuellement.

À la toute première ligne de front des enjeux RH, les gestionnaires sont au cœur du modèle de l’orientation-employé·e : moins de planification opérationnelle (production de rapports, de processus et de présentations) et plus de temps pour connaître, accompagner et développer les membres de leurs équipes. Doublement au cœur de l’orientation-employé·e, ce groupe exige un solide plan de développement et de croissance.

Forbes a publié un article sur les tensions que vivent ces gestionnaires et leurs besoins : reconnaissance, respect, un carré de sable bien délimité et surtout, des investissements dans leur développement en leur offrant le soutien nécessaire pour faire face aux changements.

Pour débuter

La richesse collective du vivre ensemble dans un contexte turbulent et changeant est peut-être la réponse à bien des insécurités et tergiversations.

Et si…

Et si nous investissions sur le relationnel intraorganisationnel, dans nos modes de communication et de reconnaissance pour entretenir notre capacité à vouloir nous dépasser et surtout, prendre soin de nous et de notre personnel ?

In fine, le bien-être n’est-il pas la condition préalable au bien-faire ?

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